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Les Bouchées à la Reine (ou comment reconquérir Louis XV)

Bouchées à la Reine

C'est à Marie Leczcinska (1703-1768), une reine de France, que l'on doit la succulente recette des Bouchées à la Reine, devenue une spécialité culinaire de la Lorraine.
Marie Leczcinska, fille du roi Stanislas de Pologne, fut l'épouse de Louis XV. Comme bien des reines de France et de Navarre, elle est peu connue du grand public. Cette femme discrète et fort pieuse fut une mère et une épouse dévouée. Son mariage avec Louis XV en 1725 fut accueilli comme une déception par le peuple qui ne trouvait pas cette union assez prestigieuse pour un roi de France. Mais par sa nature douce et son caractère bienfaisant, elle finit par gagner le coeur des gens.
 
Marie Leczcinsk
Quand il la rencontra pour la première fois, elle plut beaucoup au jeune Louis qui en tomba vite amoureux. Il n'avait que quinze ans, et elle, vingt-deux. Bien qu'elle ne fût pas spécialement jolie, il la trouvait la plus belle de toutes. « Je trouve la reine la plus belle », clamait-il, en amoureux transi. De son côté, Marie était aussi très attachée. 
Pour la première fois, la Cour de France assista au spectacle idyllique de deux jeunes gens épris l’un de l’autre, un fait suffisamment rare dans l'histoire des amours royales pour être souligné : leur début de mariage fut très heureux et suivi de dix ans de bonheur et de fidélité. 
Hélas, les grossesses répétées de la reine eurent tôt fait d'émousser les ardeurs de son royal époux. En douze ans, elle mit au monde dix enfants, dont deux garçons (l'un d'eux décéda en bas âge). « Toujours coucher, toujours grosse, toujours accoucher ! », tel fut le leitmotiv de son existence.
Ses maternités la fatiguèrent et la firent vieillir précocement. Elle finit par renoncer à toute forme de coquetterie. Louis XV, qui l’avait sincèrement aimée, lui resta fidèle aussi longtemps qu'il put, puis la délaissa.
Elle commanda alors aux cuisines de la Cour un plat pour réveiller les ardeurs de son infidèle de mari. C'est ainsi qu'elle eut l'idée des "Bouchées à la Reine". 

L'objectif visé sous-entendait des ingrédients aux vertus aphrodisiaques. La recette du XVIIIeme siècle mentionnait des croûtes feuilletées, garnies d’un salpicon :
- de ris de veau  
- de cervelle d’agneau,
- de crêtes et de rognons de coq, 
- d'amourettes,
- de petites quenelles de volaille, 
- d'animelles d'agneau,
- de truffes et de champignons,
- d’olives vertes,
- le tout lié par une sauce financière.

Le plat n'eut pas l'effet escompté - Louis XV eut des maîtresses jusqu'à la fin de sa vie, les plus connues d'entre elles furent Madame de Pompadour et Madame du Barry -, mais la recette entra définitivement dans la postérité, pour le plus grand bien de nos papilles. Son père, Stanislas Leszczynski, devenu duc de Lorraine et de Bar en 1737, popularisera ce mets dans son duché et il deviendra un des fleurons de l'art culinaire français.
Ce ne fut pas la seule de ses créations. Sa gourmandise lui valut d'être à l'origine d'autres plats. Ainsi, on lui doit le "consommé à la reine", le "filet d'aloyau braisé à la royale" et l'apparition des lentilles dans notre alimentation. 
Plus tard, Marie Leczcinska se résignera à supporter l'infidélité de son mari. Elle s'enfermera dans une vie de charité, à l'écart de ses cabinets. Pour une souveraine, elle vivra très librement, peignant par exemple son teinturier Oudry dans son laboratoire ou priant dans son oratoire particulier. On la connut comme une reine vertueuse, charitable et généreuse. 
"La bonne reine" marqua le peuple par sa philanthropie : elle portait des fausses pierreries pour vendre ses bijoux et effectuer ses aumônes aux indigents, travaillait sans cesse à des ouvrages de bienfaisance, emplissant ses appartements de linge et de vêtements destinés aux pauvres, visitant couvents, ouvroirs, hôpitaux, quartiers défavorisés. Elle aida de nombreuses communautés religieuses, faisait délivrer des prisonniers, envoyer des provisions aux familles nombreuses. Elle sortait régulièrement de Versailles pour renouveler les vêtements destinés aux nécessiteux et en surveiller elle-même la distribution.
Ce fut la dernière souveraine à supporter scrupuleusement l'étiquette, et la seule qu'épargnèrent chansons, libelles et calomnies...

La vraie recette des Bouchées à la Reine : http://www.cuisine-campagne.com/index.php?2007/12/29/301-bouchees-a-la-reine