Gastronomie

Le Champagne : du vin des rois au roi des vins

Champagne

Le champagne que l'on connaît aujourd'hui est le fruit d'une longue histoire. La culture de la vigne en Champagne remonte à l'époque gallo-romaine, quand les Romains plantèrent les premiers ceps dans la région. Par la suite, le vignoble fut conservé grâce à l'intérêt que lui portait le clergé, en particulier à Reims et à Châlons-en-Champagne.
Le vin de Champagne était déjà fameux et réputé au Moyen-Age. Mais ce n'était pas le même type de vin que nous apprécions aujourd'hui. Il était rouge ou blanc et tranquille, c'est-à-dire non pétillant. Sous le règne d'Henri IV, il acquit le nom de vin de Champagne à Paris.
En 1670, dom Pérignon (1638-1715), un moine cellérier de l'abbaye bénédictine d’Hautvillers, fut le premier à pratiquer l'assemblage du raisin qui améliora la qualité du vin et en fit disparaître les défauts. Il réussit à trouver un subtil équilibre en mélangeant des raisins rouges et blancs provenant de différents villages. Il changea ainsi profondément la façon de produire du vin pétillant. C'est à lui qu'on doit le premier champagne.

Son vin doré à bulles finit par atterrir à la table du roi : celui-ci l'apprécia, et l'agrément du roi étant l'agrément de tous, le succès alla grandissant. Le champagne fut définitivement reconnu comme étant le vin des sacres le 7 juin 1654 lors de l’avènement de Louis XIV.

Tout au long du XVIIe siècle, les vins de Champagne séduiront de plus en plus les cours royales de France et d'Angleterre et l'aristocratie, sous l'impulsion de familles parisiennes qui possédaient des terres en Champagne. Les poètes les plus célèbres vantèrent ses mérites ; Voltaire s’exclama à son sujet :

"De ce vin frais l’écume pétillante
De nos français est l’image brillante."

Ce siècle marqua l'évolution du vin de Champagne : il fut mis en bouteille dès 1660 pour assurer une meilleure conservation des arômes et devint en contrepartie naturellement pétillant. Ce caractère effervescent causa beaucoup de soucis aux vignerons, à tel point qu’il fut surnommé « vin du diable » ou « saute-bouchon » à cause des bouteilles qui explosaient ou des bouchons qui sautaient sous la pression.
Les Anglais furent conquis par ce vin pétillant, et achetèrent aux Champenois des tonneaux de vin effervescent en vrac pour les mettre eux-mêmes en bouteilles.
C'est au XVIIIe siècle que le champagne commença à acquérir son rayonnement international, grâce aux propriétaires de célèbres maisons de champagne comme Florens-Louis Heidsieck ou Claude Moët. De même, certaines veuves (Mme Pommery, Mme Perrier et Mme Clicquot) contribuèrent à la notoriété du champagne. Il fut décrit comme "le vin de la civilisation" par Talleyrand.

Le champagne et Marie-Antoinette


On dit que la forme de l’ancienne coupe de champagne serait le résultat du moulage d'un sein de Marie-Antoinette. Celui-ci aurait été réalisé par un artiste de la manufacture de Sèvres qui s'en serait inspiré pour réaliser des coupes destinées à la laiterie de la reine au château de Rambouillet...

Florens-Louis Heidsieck, qui fonda sa maison en 1785, dédira un de ses vins à Marie-Antoinette.


(Florens-Louis Heidsieck présentant ses vins
à la reine Marie-Antoinette le 6 mai 1785)

Florens-Louis Heidsieck présentant ses vins

Hélas, les troubles et les guerres de la Révolution menacèrent quelque peu ce négoce... Mais c'était sans compter sur l'ingéniosité et l'habileté commerciale des négociants qui surent s'appuyer sur une nouvelle clientèle et une classe sociale émergente : la bourgeoisie. Comme l'aristocrate, le bourgeois de la Monarchie de Juillet et du Second Empire voulut lui aussi boire du vin précieux ! La violence des événements révolutionnaires stimulait son désir de fête.

Ainsi, dans des temps extraordinairement troublés, les fondateurs des Maisons champenoises surent imposer leur vin aux nouveaux grands de ce monde, et faire d'eux les ambassadeurs du vin de Champagne. La bourgeoisie avait l'avantage d'être plus sûrement solvable et surtout beaucoup plus répandue que les ci-devant nobles... C'est ainsi que le commerce du champagne dépassa les frontières.

En 1845, plus de six millions et demi de bouteilles quittèrent la Champagne, dont les deux tiers, soit plus de quatre millions, étaient à destination de l'étranger. Un puissant négoce moderne se mit alors en place pour alimenter ce juteux marché.

Sabrer le champagne

Mais au fait, d'où vient l'expression "sabrer le champagne" ? Le terme renvoie à un usage traditionnel dont l'origine remonte aux régiments de cavalerie de plusieurs armées du monde, à commencer par les hussards de la garde napoléonienne. Au retour de la bataille, les officiers sabraient le champagne pour rendre un hommage vibrant à la victoire, à la vigueur, à la virilité et aux dames : ils ouvraient les bouteilles d'un geste spectaculaire et magistral. D'un revers de lame, ils faisaient sauter le bouchon.
De nos jours, sabrer le champagne évoque de la même façon les uniformes éclatants, les festivités solennelles et les grands bals où l'élégance le dispute à l'apparat. Il est devenu synonyme d'un véritable art de vivre...

Un sabre à champagne :

Sabre à champagne